Dix recommandations pour réussir en tant que Directeur Administratif et Financier

Juil 16, 2019 | Coach Directeur financier

Vous intégrez votre premier poste de directeur financier ? Vous recherchez ce poste sur le marché ? Vous vous destinez à ce rôle dans quelques années ? Vous reprenez ce poste dans une nouvelle entreprise ?

La fonction, diversifiée, évolutive et marquée par l’intuitu personae, requiert la maitrise de certains éléments, quel que soit le secteur d’activité. 

Ayant exercé la fonction de directeur financier pendant 15 ans, en France et à l’International, j’ai piloté de nombreux projets de fusion-acquisition et de restructuration le tout dans un environnement matriciel et multiculturel.

Fort de cette expérience et de celle des clients dirigeants financiers que j’accompagne depuis 8 ans, je vous fais part demes 10 recommandations.

1. Positionnez-vous vis-à-vis du dirigeant et des actionnaires

Quel que soit la forme juridique de l’entreprise, la condition essentielle d’une bonne prise de poste et de sa pérennité réside dans la relation du DAF avec la direction générale.

Trois valeurs sont essentielles dans la relation : la confiance, le respect et l’honnêteté. Ce qui se traduit en amont par une bonne compréhension de ce que la direction générale veut et souhaite. Ceci afin d’exécuter, d’expliquer et de mesurer tout simplement si vous répondez à ses attentes ?

Autre élément : vous ne devez jamais être « quelqu’un qui dit facilement oui ». Cela assoit votre légitimité ; avec une nuance : en public, au sein du comité de direction, vous devez être loyal à 100% à la direction générale. Mais vous devez être celui qui est en mesure de contester et d’argumenter avec elle portes fermées.

Lorsque j’ai été amené à élaborer des projets de restructuration, il m’est arrivé de m’opposer à mon PDG en préconisant des mesures réparties équitablement sur l’ensemble de la structure, au lieu d’un scénario qui protégeait trop le haut de la hiérarchie ; au final nous arrivions à un consensus et nous faisions alors front commun pour réussir la mise en œuvre au sein de la société.

2. Maitrisez votre communication

Vous devrez assumer le rôle de celui qui dit « non » à certaines des demandes faites en interne, il est important cependant de savoir motiver votre refus, voire d’orienter vos interlocuteurs vers d’autres solutions.

Vous maitrisez les chiffres et vous devez savoir les communiquer tant en interne qu’à l’extérieur de l’entreprise. En interne, cela suppose une capacité à présenter les chiffres à ceux qui sont moins experts en la matière. Plus largement cela requiert de savoir s’adapter à son auditoire aussi varié soit-il : investisseurs, actionnaires, auditeurs, banquiers, fournisseurs, CSE, …

 A votre niveau, il n’est pas nécessaire de connaître tous les détails, cela étant vous devez être capable de les trouver et ils doivent être exacts. Votre objectif est de vous faire comprendre. Pour ce faire, capitalisez sur la synthèse, les explications graphiques, les métaphores etc., et bannissez toute formule proche de « je vous épargne les détails », forcément perçu par votre public comme une marque de mépris.  

Vous devez également être capable de comprendre le style de communication préféré de votre auditoire, et alors il est vital de savoir vous y adapter en anticipant les attentes qui varie suivant votre public : un investisseur privilégiera la création de valeur alors le CSE privilégiera la rémunération du personnel.

 Lorsque je présentais les comptes annuels au CSE, j’avais à cœur d’être aussi pédagogue et transparent que possible afin qu’ils comprennent les documents présentés et qu’ils me fassent confiance. Honnêtement, je préférais avoir à faire avec eux plutôt que de prendre le risque qu’ils mandatent un jour un expert-comptable pour auditer nos comptes.

3. Misez sur le relationnel et développez votre réseau

Pour asseoir votre leadership, veillez à établir des relations à tous les niveaux tant en interne qu’à l’externe. Pour cela, avant votre prise de poste, cartographiez l’environnement de l’entreprise avec deux critères : la représentativité et la pertinence. Pensez certes aux investisseurs, actionnaires (familiaux ou non), banques et créanciers mais aussi aux fournisseurs, assureurs, institutions représentatives du personnel, voire aux syndicats. Sans oublier les groupes de pression locaux et environnementaux.

Ceci fait, reste à comprendre et à concilier les exigences de chaque partie prenante en étant proactif et en gérant les attentes. Mettez-vous dans la position de chacune des parties prenantes et demandez-vous quel est leur intérêt dans l’entreprise. À partir de ce point, développez une stratégie de gestion des parties prenantes.

Lors d’appels d’offres pour des contrats de sous-traitance, je présentais mes attentes en termes tarifaires et pour faciliter l’effort demandé aux fournisseurs, je proposais un allongement de la durée du contrat, ce qui permettaient à ces derniers d’avoir plus de souplesse pour amortir les investissements nécessaires aux gains de productivité.

 Les relations internes doivent se construire dès le début. Soyez vu et entendu. Plutôt que de vous enterrer dans les tâches administratives, aidez les directeurs et managers opérationnels à comprendre leurs chiffres et à mieux piloter leur périmètre.

4. Assumez votre rôle de conscience et incarnez la confiance

Soyez prêt à challenger, à questionner voire à vous lever pour dire ce qui ne collera pas du point de vue des chiffres (tout en veillant à ne pas tomber dans l’agressivité ni à mettre en porte à faux votre dirigeant vis-à-vis de tiers). Ce n’est pas que tout le monde soit malhonnête, mais ils attendent tous de vous que vous soyez leur conscience.

Quoique la fonction de DAF évolue, vous êtes et resterez le gardien des finances. On doit donc vous faire confiance. Vous devez maintenir cette confiance par votre discours, votre positionnement tout autant que par les processus de contrôle ou de détection de fraude que vous superviserez ou mettrez en place.

Être un bon directeur financier, c’est être prêt à faire part immédiatement des mauvaises nouvelles, sans faire référence à votre source ou penser à la sanction éventuelle.

5. Managez votre équipe et entourez-vous des personnes compétentes

DAF, vous êtes responsable d’une équipe, que vous devez parfois constituer, souvent conserver voire renouveler en partie.

Vous devez impérativement accepter de déléguer à vos adjoints et ne cherchez pas à comprendre les particularités de leurs métiers. Vous déléguez plus particulièrement les aspects comptables à l’exception des ajustements de clôture ainsi que le contrôle de gestion opérationnel, en vous focalisant sur les performances et indicateurs clés des centres de profit. Il n’en demeure pas moins vrai que votre responsabilité reste pleine et entière sur tous les aspects de la fonction finance. 

Il est essentiel de veiller à bien saisir la culture d’entreprise qui anime votre équipe, afin de mieux y imprimer votre marque, voire la changer complètement. Éviter toutefois de critiquer vos prédécesseurs : votre équipe pourrait prendre ces commentaires comme une insulte.

Quel que soit la taille de votre entreprise, je vous conseille de ne dépassez pas le seuil de 8 managers qui vous sont rattachés afin de ne pas perdre en proximité. Retenez que votre rôle est d’avoir un dialogue régulier avec vos managers de proximité, d’être auprès d’eux pour les guider dans l’atteinte leurs objectifs, leur donner du feedback, puis de communiquer avec l’ensemble de votre équipe de temps en temps. Il est essentiel d’être à l’écoute de vos collaborateurs, de leurs idées, encouragez-les à être une vraie force de proposition car ils sont plus proches que vous du terrain. Considérez le temps que vous passez en management comme important, celui peut facilement représenter jusqu’à 20 à 25% de votre temps de travail

J’avais des rendez-vous hebdomadaires ou bimensuels avec mes managers de proximité, et j’organisais une réunion avec l’ensemble des services sous ma responsabilité 3 fois par an. C’était alors pour moi l’occasion de les informer des grandes lignes sur les activités de l’entreprise, les résultats, les projets et de répondre à leurs questions. C’était une de mes manières de reconnaître le travail accompli par mes équipes et de situer leur contribution dans la bonne marche de l’entreprise. 

Évaluez vos ressources, en termes de qualité et de quantité. Les compétences techniques sont importantes, mais n’oubliez pas de bien appréhendez les talents comportementaux, vous pourrez toujours envoyez votre collaborateur en formation pour compléter les premières mais vous ne pourrez pas changer sa personnalité, son comportement sans sa propre volonté. Et ce dernier point est celui qui peut avec le temps vous faire perdre beaucoup d’énergie. 

 Lors de recrutements, j’interrogeais les challenges vécus par le passé et les leçons apprises, les valeurs de la personne, je vérifiais les références autant que possible, je demandais à un collègue opérationnel, puis au DRH ou à mon patron d’interviewer le candidat pressenti.

Assurez-vous que les buts et objectifs fixés à vos collaborateurs soient définis et compris par tous. Ne vous limitez pas à un entretien d’évaluation dans l’année, prévoyez de faire un à deux points intermédiaires. Au-delà de la compensation salariale, la reconnaissance des performances ponctuelles est essentielle pour motiver vos collaborateurs, et vous pouvez toujours offrir un jour de congé supplémentaire, cela est très apprécié et échappe aux contraintes budgétaires éventuelles.

6. Acceptez de plus être un expert.

Contrairement à de nombreuses autres fonctions financières (chef comptable, trésorier, contrôleur de gestion, …) vous ne pouvez pas ou plus revendiquer une expertise technique.

Le DAF a un rôle généraliste et non pas fonctionnel. N’ayez pas peur de dire que vous ne savez pas, mais vous devez savoir où trouver la bonne réponse ou solution. Pour diriger le navire, vous aurez besoin d’un soutien de qualité et de conseils externes (avocats en droit fiscal, droit social, droit des affaires, droit commercial, en propriété intellectuelle, …, auditeurs, experts en systèmes d’information, …). Vérifiez que vous disposez de la bonne équipe, avec une variété d’expertise (en trésorerie, contrôle de gestion, achats/approvisionnements, …) selon le positionnement de l’entreprise, en incluant vos auditeurs et vos conseillers fiscaux. Sachez où aller pour obtenir les conseils juridiques et l’expertise en matière de respect des normes. Cependant, vous ne pouvez pas risquer d’être perçu comme quelqu’un d’influençable par ces mêmes conseillers. Réservez-vous du temps pour interpréter et mettre en œuvre, bref pour vous approprier les préconisations ou avertissements émis par ces conseils. 

Il vous arrive de consulter vos avocats pour comprendre un nouveau texte de loi et son application dans votre entreprise. Et pour que ces derniers fassent un bon travail, il est important que vous soyez transparent sur ce qui se passe au sein de votre entreprise en rapport avec le sujet traité. Toutefois, il vous appartient d’être vigilant dans le choix de vos conseillers, n’oubliez pas de vérifier leurs références.

Travaillant depuis des années en grande confiance avec une avocate spécialisée en droit des sociétés, je lui demandais de temps en temps si elle pouvait me recommander un avocat ou consultant spécialisé dans tel ou tel discipline partageant les mêmes normes de qualité et valeurs que les siennes. 

7. Soyez un directeur administratif et financier tourné vers la création de valeur

Pour comprendre ce qui conduit à la création de valeur dans l’entreprise, vous devez devenir très business : en ce sens que votre rôle exige une compréhension complète des clients, des marchés, des aspects RH, des processus de production, des contraintes logistiques, des étapes de commercialisation, et comment cela génère de la valeur. 

Être DAF, cela veut aussi dire que votre périmètre peut inclure des domaines spécialisés a priori éloignés de votre cœur de métier : chaîne d’approvisionnement, services généraux, ressources humaines parfois et, surtout les systèmes d’information. Sur ce point, vous aurez besoin de vous impliquer dans les SI, du point de vue financier, mais également du point de vue de l’entreprise afin de comprendre chaque fonction et chaque besoin. Objectif : développer une stratégie des systèmes d’information souple et tournée vers l’avenir.

Lorsque j’ai décidé créer une direction des achats, j’ai recruté une experte dans le domaine : je me suis focalisé sur la compréhension des procédures à mettre en œuvre, sur l’évaluation des talents relationnels de cette personne et bien sûr les résultats chiffrés mais aussi la satisfaction des clients internes en termes de qualité.

8. N’oubliez pas : le cash est roi, encore et toujours

Les crises qu’elles soient économiques, sanitaires ou climatiques, nous rappellent combien une bonne gestion de trésorerie est clé pour faire face aux charges fixes à payer et à l’incertitude sur une reprise.

Rappelez-vous que c’est le travail du directeur financier de dire « non ». Vous devez être capable d’appréhender les risques et de vous assurer que l’argent ne soit pas gaspillé sur un projet quelconque.

Si vous étiez précédemment responsable du contrôle gestion, ce qui change dorénavant c’est votre capacité à transformer le profit en cash d’exploitation, d’accroître le retour sur les investissements, c’est ainsi que vous préserverez votre entreprise des crises. 

9. Créez l’équilibre entre risques et opportunités

Responsabilité légale, évaluation des risques, protection de l’entreprise, et des salariés, la gestion des risques a pris extrêmement d’importance dans l’agenda du DAF au cours de ces dernières années et encore plus récemment. Vous aurez parfois la responsabilité des questions d’hygiène et sécurité voire également celle des ressources humaines.

Dans ce contexte, vous devez rechercher un juste équilibre entre contrôles adéquats et gestion des risques afin de ne pas empêcher l’entreprise de saisir les opportunités d’une croissance rentable.

10. Donnez du sens au reporting

Le reporting doit constamment être de haute qualité et délivré à temps à la direction générale, puis le cas échéant aux actionnaires ou à la maison mère. Il ne sert pas seulement au passé : il permet de d’améliorer l’existant et de piloter la vision stratégique. Il doit donc être converti en objectifs actionnables et mesurables.

Chaque unité opérationnelle reçoit mensuellement la partie qui la concerne dans ce reporting, les résultats de la période écoulée avec notamment les KPIs (indicateurs de performance), mais aussi le cas échéant l’état des commandes en cours pour les mois à venir, une balance âgée de leurs créances clients, … Les opérationnels étant sollicités par votre équipe pour l’élaboration de ce reporting, je vous encourage en retour de revoir de temps en temps avec eux le contenu de celui-ci afin de voir comment rendre ce reporting encore plus utile à leur niveau, en y rajoutant des nouveaux indicateurs et en en supprimant d’autres peut-être. 

Certes, il vous sera impossible d’avoir toutes les réponses, mais vous devez être en mesure de deviner toutes les questions impactant l’activité et la pérennité de l’entreprise et de leur fournir une réponse solide et rapide. Les éléments doivent donc être faciles à obtenir. 

 

En fonction de la taille et du contexte de l’entreprise qui vous emploie, certaines recommandations peuvent ne pas s’appliquer à votre situation, il s’agit avant tout de vous amener à prendre du recul et à réfléchir comment encore mieux réussir dans votre poste de directeur financier, ou ce qui sera attendu de vous lorsque vous parviendrez à ce niveau de responsabilité.